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La Californie invente le gouverneur jetable


United States : politics without the policies

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LE MONDE DIPLOMATIQUE - novembre 2003 - Pages 6 et 7

1.

Le Monde diplomatique - November 2003

2.

La Californie invente le gouverneur jetable

2.

United States : politics without the policies

3.

Par Serge Halimi & Loïc Wacquant

3.

By SERGE HALIMI AND LOÏC WACQUANT (Translated by Harry Forster)

4.

Que peut la célébrité ? Beaucoup. Mais elle n’est pas tout. Devant une gestion calamiteuse, la colère des habitants provoque l’inattendu. Jusqu’à un certain point. En Californie, un challenger haut en couleur peut faire mordre la poussière à un gouverneur falot et perçu comme incompétent. Mais l’inverse s’est aussi produit. Il y aura un gouverneur Arnold Schwarzenegger. Il n’y eut jamais de gouverneur Upton Sinclair. A presque soixante-dix ans d’intervalle, le contraste entre les deux épopées présente un caractère pédagogique. Il vaut qu’on s’y arrête, au-delà du dernier « cirque électoral » offert au monde par l’Amérique, dans la lignée du fiasco de Floride il y a trois ans.

4.

THE latest electoral show in the United States, which is a tragicomic sequel to the presidential election fiasco in Florida three years ago, deserves a closer look. Celebrity can make a big difference, but it’s not everything. Faced with gross mismanagement an angry electorate can cause problems. In California a colourful challenger can bring down a drab governor with a reputation for incompetence (but the opposite has also happened). We now have Governor Arnold Schwarzenegger of California, but Upton Sinclair never became governor there. The two campaigns are almost 70 years apart and the contrast between them is instructive.

5.

A l’époque de la campagne d’Upton Sinclair, en 1934, on parlait déjà de « populisme ». Aujourd’hui aussi. Comme il a changé depuis... Upton Sinclair avait pratiqué le journalisme d’investigation dirigé contre les puissants. En 1906, il avait écrit La Jungle , roman militant diffusé à des millions d’exemplaires détaillant l’exploitation ouvrière dans les bas-fonds de Chicago. Il avait aussi produit un film d’Eisenstein, défendu Sacco et Vanzetti, converti plus d’Américains au socialisme que n’importe qui. En 1934, cette « célébrité » remporte les primaires démocrates avec plus de suffrages que tous les autres candidats réunis. Le titre de son manifeste de campagne est aussi long qu’immodeste : Moi, gouverneur de Californie, et comment j’ai mis fin à la pauvreté. La vraie histoire de l’avenir. Cette histoire-là attend toujours.

5.

When Upton Sinclair, a writer, fought his campaign in 1934, there was already talk about “populism”. He had been an investigative journalist who targeted the ruling classes. In 1906 he had published The Jungle, a novel that described the appalling conditions in the Chicago stockyards ; it sold millions of copies. He had produced the film Que Viva Mexico, directed by Eisenstein ; he had supported Sacco and Vanzetti [immigrants who were victims of a show trial] ; and he had converted more Americans to socialism than anyone else. In 1934 he won the Democratic primary with more votes than all the other candidates put together. His ambitious manifesto had this title : “I, governor of California, and how I ended poverty. A true story of the future.”

6.

Comme le reste du pays, aux prises avec la Grande Crise, la Californie va alors très mal. Upton Sinclair propose que les usines inactives soient louées par l’Etat à leurs propriétaires et confiées ensuite à leurs ouvriers, afin que ces derniers possèdent ce qu’ils produisent, au lieu de n’avoir rien. L’Etat a besoin d’argent ? On lèvera un impôt sur les grands studios. Ils rechignent ? On leur imposera, en plus, de respecter le droit syndical, et, à défaut, on collectivisera le cinéma. La MGM et Warner menacent de s’exiler en Floride au cas où Sinclair serait élu.

6.

Like the rest of the US, California was deep in the Great Depression. Sinclair suggested that the state should rent idle factories from their owners and hand them over to the workforce, giving workers ownership of their production : critics pointed out that California was already short of money. Sinclair advocated taxing big film studios : if they objected, he would force them to comply with union rules, and if that didn’t work the film industry could be collectivised. MGM and Warner both threatened to move to Florida if Sinclair was elected.

7.

Aucun journal d’information générale ne soutient Sinclair. Plus de 700 s’opposent à lui, frontalement. Son physique ne ressemblait pas vraiment à celui d’Arnold Schwarzenegger : le Los Angeles Times moque même l’ « homme efféminé avec un sourire fat ». Mais, à l’époque, cela est bien accessoire. Les possédants suggèrent en effet l’apocalypse : l’élection de Sinclair attirerait sur la Côte ouest les millions de miséreux du pays. Le New York Times joue son rôle de média moderne en mentant sans vergogne. Il annonce « un afflux notable de chômeurs en Californie du Sud, une conspiration bien organisée destinée à inscrire des nouveaux venus indigents sur les listes électorales ». Favorable à la cause de Sinclair, un film de King Vidor et Joseph Mankiewicz, Our Daily Bread , ne trouve curieusement pas de producteur. Puis sa diffusion sera retardée en Californie pour n’intervenir qu’après l’élection...

7.

No mainstream newspaper supported Sinclair, and many were openly hostile - the Los Angeles Times called him an “effeminate man with a fatuous smile” (true, he didn’t have Schwarzenegger’s muscles). The wealthy claimed Sinclair’s election would be a disaster, because it would attract millions of poor Americans to the West Coast. The New York Times predicted “a noticeable influx of unemployed persons into Southern California, a well-organised plot to register indigent newcomers”. A film by King Vidor and Joseph Mankiewicz backing Sinclair, Our Daily Bread, failed to find a producer and the studios delayed its release in California until after the election.

8.

Les grandes brasseries, Southern Pacific, Standard Oil et PG & E (la compagnie d’électricité privée qui fut au coeur des « black-out » ayant frappé la Californie en 2002) financent un programme de destruction du candidat démocrate. Des tracts le présentent sous les couleurs d’un « dynamiteur de toutes les Eglises et institutions chrétiennes, un agitateur communiste ». Une confédération patronale de Californie recommande à ses membres de « distribuer personnellement (il serait préférable que le patron s’y consacre lui-même) à chaque employé des brochures anti-Sinclair pour les faire réfléchir aux dangers encourus par leur emploi en cas d’élection ».

8.

The big breweries, the Southern Pacific railway, Standard Oil and the Pacific Gas and Electricity Company (a key player in the 2002 blackout of California) funded an attempt to wreck Sinclair’s campaign. Tracts called him a communist agitator out to bomb churches and Christian institutions. The local employers’ organisation encouraged its members to “secure a supply of anti-Sinclair literature and place it with each employee personally. Then the boss should urge them to soberly think of the danger to their jobs if Sinclair is elected and be sure to cast their votes.”

9.

Aucun péril de cet ordre pour les patrons californiens avec le « populiste » Schwarzenegger. Il les a d’emblée rassurés... dans le Wall Street Journal : « Les impôts nouveaux que réclament MM. Davis et Bustamente [ses concurrents démocrates] me rappellent les androïdes que je combats dans mes films de Terminator. Je les tue, et ils ne cessent de ressusciter. Mon plan pour secourir l’économie est basé sur des valeurs opposées. Je veux alléger le poids des réglementations qui pèsent sur les entreprises et étranglent la croissance. D’ici trois ans, je veux que la Californie devienne l’un des meilleurs endroits du pays pour faire des affaires. »

9.

There was no risk of Arnold Schwarzenegger behaving with Sinclair-like liberality. He put employers’ minds at rest with an op-ed piece in the Wall Street Journal : “This endless litany of taxing schemes by Messrs Davis and Bustamante [the Democrat opponents] reminds me of the androids I fight in the Terminator movies, which I keep shooting dead but keep coming back to life. My plan to rescue the economy in California is based on the opposite set of values : I want to slash the cost of doing business in California ; I want to unburden businesses from regulations that strangle economic growth ; I want to bring taxes down to levels competitive with our neighbouring states. Within three years, I want business groups to trumpet the fact that California is once again one of the best places in the country to do business”.

10.

Upton Sinclair tirera les conséquences de sa défaite relativement étroite : « C’est la révélation de ce que l’argent peut faire dans la politique américaine, et en particulier quand les privilèges sont menacés. » Pendant la campagne de 1934, les consultants politiques de la firme Whitaker & Baxter avaient obtenu que chaque cinéma diffuse, comme si elles étaient des bandes d’actualité, des courts métrages de fiction présentant des (faux) partisans de Sinclair comme autant de loqueteux patibulaires et édentés rêvant d’une révolution de type soviétique. Les consultants vont retenir une autre leçon, cynique, de leur victoire : « L’Américain moyen ne veut pas être éduqué, il ne veut pas se développer l’esprit, il ne veut pas faire l’effort d’être un bon citoyen. Presque chaque Américain préfère être diverti. Il aime les films, il aime les feux d’artifice et les parades. Si vous n’êtes pas capable de vous battre, MONTEZ UN SPECTACLE. » En 1966, Sinclair quitte la Californie. C’est l’année de l’élection au poste de gouverneur d’un acteur du nom de Ronald Reagan...

10.

Sinclair said of his relatively narrow defeat : “It is a revelation of what money can do in American politics, what it will do when its privileges are threatened”. During his campaign a pioneering firm of political consultants, Whitaker & Baxter, had phoney newsreels shown in cinemas featuring fictional “Sinclair supporters” in rags advocating a Soviet-style takeover. Whitaker & Baxter drew a cynical conclusion from their victory : “The average American doesn’t want to be educated, he doesn’t want to improve his mind, he doesn’t even want to work consciously at being a good citizen. But most every American likes to be entertained. He likes the movies, he likes mysteries ; he likes fireworks and parades. So, if you can’t fight, PUT ON A SHOW”. Sinclair, who died in 1968, left California in 1966 - the year that an actor, Ronald Reagan, was elected its governor.

11.

Travelling avant. La Californie n’a plus 7 millions d’habitants, comme en 1934, mais 35 millions, et elle serait la sixième puissance économique du globe. M. Schwarzenegger est acteur, républicain, richissime - on estime sa fortune entre 250 millions et 800 millions de dollars. « Terminator » promet il y a quelques mois de « terminer » le gouverneur Gray Davis, fraîchement réélu mais déjà accusé de mille maux, et notamment d’un déficit public gargantuesque, creusé par le mouvement en ciseaux des dépenses publiques qui montent et des recettes fiscales qui s’effondrent avec le krach de la « nouvelle économie » et du marché boursier.

11.

The population of California has risen from 6-7 million in the 1930s to 35 million today and the state boasts the fifth-largest economy in the world (2000 figures). Schwarzenegger is an actor, a Republican, with a personal fortune of $250m-$800m. A few months ago he undertook to terminate the governorship of Democrat Gray Davis, recently elected but accused of many sins, especially a gigantic public deficit caused by rising public expenditure and plummeting tax revenue after the downturn in the new economy and the stock markets.

12.

Les Californiens ont cru, plus et avant tous les autres, aux chimères de cette « nouvelle économie » : croissance perpétuelle et richesse pour tous au coin de la rue. Avec le retour subit de la récession, du chômage et des déficits que l’on croyait à jamais révolus, le réveil est douloureux. Il faut que quelqu’un paie la désillusion collective. Ce sera M. Davis. Sa déchéance servira d’exutoire à une population flouée par sa propre crédulité.

12.

Californians really believed in the new dotcom economy, jumping on the bandwagon ahead of fellow Americans, convinced it would bring endless growth and riches for all. The sudden return of recession, unemployment and budget deficits was a painful awakening. Someone had to pay for their collective disappointment and Davis was an ideal scapegoat.

13.

Le deuxième gouverneur révoqué de l’histoire du pays est un politicien de métier, élu continûment depuis trente ans, emblématique du « système » jusqu’à la caricature. Dépourvu de charisme et d’idées, il est connu pour sa capacité légendaire à « lever des fonds » en vue de ses campagnes et pour la férocité des guerres publicitaires qu’il déchaîne contre ses opposants.

13.

Davis, who is only the second governor in the history of the US to be recalled, is a career politician and a typical example of a man who knows how to work the political system. He has been in office for 30 years without interruption, although he has neither charisma nor ideas. He is well known for his campaign fund-raising skills and the ferocity of his political advertising.

14.

M. Schwarzenegger est son antithèse vivante : culturiste de formation, ancien « M. Univers », inventeur de l’industrie du body-building, puis héros de films d’action gorgés de muscles bandés et de tueries sans rime ni raison. Il n’a jamais brigué de poste électif ni été membre de la moindre association civique ou politique. Il n’a pas même pris la peine de voter lors de la dernière élection présidentielle, pas plus d’ailleurs qu’à douze des vingt scrutins précédents. Le box- office a fait de lui un millionnaire. Bref, le profil idéal pour séduire l’électorat largement dépolitisé de Californie qui entend « sortir le sortant », son gouverneur réélu dix mois auparavant dans l’indifférence générale.

14.

Schwarzenegger started as a body-builder and won the Mr Universe contest for the first time in 1967. He set about turning body-building into a growth industry, gradually entering films and eventually starring in major action movies. He has never before run for electoral office, nor he has he ever been a member of a social or political action group. He did not even vote in the last presidential election. Movies made him rich, giving him the ideal celebrity status to win over California’s mostly apolitical electorate and dispose of a governor re-elected 10 months earlier in a mood of widespread indifference.

15.

M. Schwarzenegger a surmonté sa pauvreté à lui, les autres n’ont qu’à l’imiter. Son projet ? Balayer les écuries d’Augias, c’est-à-dire celles de Sacramento. On voudrait en savoir davantage sur ce travail de nettoyage. Il réplique qu’il a cent fois réalisé l’impossible dans ses films d’action, qu’il est « chef d’entreprise » et qu’il « veut rendre à la Californie, qui lui a tant donné ». Déréguler, désencadrer et démonter les politiques publiques, afin de restituer « au peuple » l’argent qui lui est volé par l’impôt...

15.

Schwarzenegger maintains that if he was able to triumph over his poor background, others can follow his example. He promises to cleanse the Augean stables, meaning the seat of government in Sacramento. Asked to enlarge on this, he explains that he has done impossible things in his movies often enough, that he is a businessman, and that he wants to repay his personal debt to California. His aim is to deregulate the economy, decrease public intervention and return tax-payers’ money.

16.

Sa décision de concourir contre Davis n’a rien du coup de tête, même si elle fut annoncée en août dernier sur le show du bateleur de télévision Jay Leno « à la surprise générale ». Son absence délibérée de programme a été dûment testée par des « groupes témoins » réunis dès le mois de juin à San Francisco, coeur « progressiste » de l’Etat, et dans la vallée de San Fernando, un bastion conservateur. La stratégie consiste à contourner les médias traditionnels, surtout la presse écrite, pour s’adresser directement « au peuple » par le truchement des stations de talk-radio et des émissions télévisées de variétés.

16.

Schwarzenegger carefully considered his decision to run against Davis, even if he actually announced his decision on Jay Leno’s Tonight show, supposedly as a surprise. His aides tested his deliberate lack of a political programme on focus groups that had been meeting since June in San Francisco, the progressive heart of California, and in the San Fernando valley, a conservative stronghold. His strategy avoided traditional media, particularly newspapers, and talked directly to the people via radio and TV shows.

17.

Il suffira d’asséner quelques répliques tirées de ses films les plus célèbres et d’éviter qu’« Arnold » (l’usage de son petit nom a été testé lui aussi) ait à prendre le moindre engagement qui dévoilerait l’inanité réactionnaire de son programme. L’accès à M. Schwarzenegger, qui promet de « botter les culs à Sacramento », est donc bouclé. Tous les employés de sa campagne doivent signer des « contrats de confidentialité » draconiens leur interdisant, sous peine d’amendes extravagantes, de livrer la moindre information sur leur chef.

17.

The priority was to put across soundbites from his most successful films and avoid Arnold (pollsters had tested the use of his first name) having to make any commitments that would reveal the reactionary vacuity of his programme. His staff made sure he was hard to reach : they had had to sign strict confidentiality agreements, with provision for heavy fines, preventing them from leaking any information on the candidate.

18.

C’est ainsi qu’« Arnold » court-circuite les émissions de télévision « sérieuses », s’abstient de donner des conférences de presse, et boycotte même les débats publics avec les autres candidats majeurs, à l’exception de la seule confrontation télévisée, pour laquelle... les débatteurs disposent des questions à l’avance. « Arnold », invisible sur les plateaux des programmes politiques, est en revanche omniprésent sur les talk-shows les plus sirupeux, ronronnant chez Oprah Winfrey, rugissant sur le « David Letterman Show », souriant et matinal sur le « Today Show », paternel chez l’inamovible Larry King, de CNN. C’est le deuxième principe de sa stratégie de non-campagne : passer par-dessus des médias californiens, pour les réinvestir par le biais des médias nationaux en jouant à fond la carte de la célébrité.

18.

Schwarzenegger bypassed serious television programmes, gave no press conferences and even boycotted public debates with the other main candidates. The only exception was a TV confrontation for which participants received the questions ahead of time. But he made many appearances on talk shows, including those of Oprah Winfrey, David Letterman and Larry King. This was the second part of his non- campaign strategy, focusing on national rather than local media to play up his celebrity status.

19.

Le dispositif d’« évitement méthodique du politique » est parachevé par la « starisation » de son épouse, la journaliste de NBC Maria Shriver. Membre du clan Kennedy, elle rassure. Sa présence au-devant de la scène, ses baisers appuyés et ses éloges sur « le respect qu’Arnold voue aux femmes depuis trente ans » vaudront réponse aux accusations d’atteintes sexuelles qui pleuvent sur son viril époux dans la dernière ligne droite de la non-campagne.

19.

His staff improved his non-political image by bringing his wife, NBC journalist Maria Shriver, a member of the Kennedy clan, into the limelight. Her presence was reassuring. Her public displays of affection and tributes to Arnold’s respect for women over the past 30 years helped to protect him against the accusations of sexual harassment that plagued the last part of the campaign.

20.

« Ils ne cessent d’arriver », expliquait en 1994 un ancien gouverneur républicain, Pete Wilson, qui a dirigé M. Schwarzenegger. « Ils », c’était les Mexicains, quémandeurs d’aide sociale, délinquants en puissance, campant dans les écoles et les hôpitaux publics, fardeau fiscal sans cesse plus pesant. Le nouveau gouverneur n’a pas repris ce genre de discours. Il a même joué au maximum de son passé d’étranger et de son fort accent autrichien. Mais il a promis de revenir sur les lois « laxistes » en la matière. Inutile pour lui de trop en faire, son principal concurrent démocrate se nommait Cruz Bustamente...

20.

“They keep coming,” Pete Wilson, a former Republican governor and Schwarzenegger’s campaign manager, said in 1994. “They” referred to Mexicans and “welfare scroungers”, camping out in schools and hospitals, a growing tax burden. Schwarzenegger carefully avoided such talk, since his main opponent was the Democrat Cruz Bustamante ; it would have been a mistake to overplay that card. Although he promised to repeal lax laws on immigration he deliberately stressed his immigrant past and his Austrian accent.

21.

M. Schwarzenegger avait appuyé le projet d’interdire aux clandestins et à leurs enfants l’utilisation des écoles et des hôpitaux publics. Cet humanisme sélectif ne l’a pas empêché de trouver en France des partisans « libéraux ». Un très placide député du groupe UDF au Parlement européen, M. Jean-Louis Bourlanges, s’est même métamorphosé en groupie exubérant de « Terminator » : « C’est un faux conservateur. Au Royaume-Uni, c’est quelqu’un qui aurait été libéral-démocrate, et en France, UDF. (...) C’est l’incarnation du rêve américain ! Elia Kazan est mort, mais le rêve américain continue. Il est là ! »

21.

[Paragraphe non traduit]

22.

A cela près que le petit immigrant autrichien au nom imprononçable n’est pas un résistant du groupe Manouchian, mais le candidat des possédants qui, en moins de sept semaines, a levé et dépensé 22 millions de dollars, dont plus de 10 millions de sa fortune, pour acheter son dernier jouet : une résidence de gouverneur à Sacramento. Le solde est venu de généreux donateurs privés, ces fameux « intérêts catégoriels » que M. Schwarzenegger a pourtant promis de pourfendre avec l’intrépidité de Conan le Barbare.

22.

Despite his poor origins, he was able to raise and spend $22m in seven weeks, including $10m from his own funds, to buy his latest toy, the governor’s residence in Sacramento. Generous private donors (the same vested interests he promised to terminate) contributed the rest.

23.

Avec 80 millions de dollars en soixante-dix jours, la campagne californienne a, une fois encore, battu tous les records. Si l’on en croit l’ancien porte- parole du président George W. Bush, M. Ari Fleischer, ce ne serait là que l’expression de la ferveur populaire pour la vie civique : « L’argent que les candidats lèvent pour notre démocratie est le reflet du soutien qu’ils recueillent dans l’ensemble du pays. » A ce compte, la démocratie n’a jamais été aussi vivante aux Etats-Unis...

23.

The campaign again beat all spending records, burning up $80m in 70 days. If we are to believe President George Bush’s former spokesman Ari Fleischer, such lavish expenditure is merely a demonstration of public interest in political life : “I think the amount of money that candidates raise in our democracy is a reflection of the amount of support they have around the country”. In which case, US democracy has never been in better shape.

24.

Un « coup d’Etat juridique » de la Cour suprême a porté M. Bush au pouvoir il y a trois ans. La Californie vient d’ajouter à ce modèle celui, clé en main, du « coup d’Etat médiatique ».

24.

A legal coup by the Supreme Court gave Bush the presidency three years ago. Now California has perfected the media coup.

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